C’est un retour très attendu que celui du champion olympique Tony Yoka.
Absent des rings depuis plus de 8 mois et sa victoire à Roland Garros face à Petar Milas, le francilien relevait le défi de remplir l’Accor Arena avec plus de 13500 spectateurs. Un rendez-vous qui a réuni les passionnés du Noble Art mais aussi les jeunes de tous les quartiers de la région. Notamment des Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville invités pour grand nombre par la Région Île-de-France et son Vice-Président Patrick Karam qui à chaque évènement sportif auquel il associe le territoire encourage les publics éloignés à se rendre aux évènements et à profiter du sport comme spectacle et comme vecteur de rassemblement. C’est aussi cette mission qu’il faut valoriser à travers ces évènements internationaux qui mettent en lumière nos athlètes, le territoire et porte un message puissant pour que toute la jeunesse francilienne ait la chance de vivre un moment sportif et festif.
Car oui, le sport a ce rôle essentiel de gommer les inégalités et faire rêver une jeunesse francilienne qui a souffert de la crise sanitaire et qui s’est rendue fièrement à l’Accor Arena pour soutenir et applaudir les athlètes franciliens à l’affiche.
Si la Boxe en Île-de-France est certes populaire, nos athlètes, notamment lorsqu’ils deviennent professionnels, rencontrent des difficultés à s’entraîner et à se dédier totalement à leur sport qui devient leur métier. On a encore beaucoup de mal avec la professionnalisation et de nombreuses boxeuses ou boxeurs qui ont longtemps officié en équipe de France ont des difficultés à trouver la bonne organisation lorsqu’ils passent dans le rang professionnel.
Aujourd’hui, le territoire francilien est l’un des mieux représenté sur la scène internationale avec des boxeurs connus et reconnus mais souvent contraints de s’éloigner du local pour mieux s’accomplir alors qu’ils y sont profondément attachés. Pourtant le 14 mai dernier, Tony Yoka, longtemps licencié dans la région peut être fier d’avoir redonné ses lettres de noblesse à un sport qu’on cherche à populariser, redynamiser en alliant le sport pour tous, l’école de la vie et la performance depuis l’exploit accompli à l’occasion des Jeux Olympiques de Rio en 2016.
Si la victoire n’était pas au bout de la soirée du 14 mai, il ne le sait peut-être pas encore mais Yoka a « fait le job » comme diraient les américains.
Et quel difficile job que celui de raviver une flamme indispensable dans le cœur des supporters et pour la dynamique sportive régionale qui a montré combien Paris est beau et combien nos boxeurs talentueux se sacrifient pour que toutes les générations présentes ce soir-là à l’Arena repartent avec un souvenir, photo, selfie et étoiles dans les yeux avec la présence de Souleymane Cissokho, Ciryl Gane ou encore la star internationale de NBA Rudy Gobert et évidemment la mascotte de tous les évènements boxe, la boxeuse handi Laetitia Yvon qui suit la team Yoka à chaque déplacement et qui prouve en pratiquant la boxe qu’elle a découvert après l’engouement des JOP de RIO qu’on peut avoir un handicap, l’accepter et être déterminée à vivre sa passion. Toujours impressionnée par son abnégation et optimisme communicatifs que tous les boxeurs lui reconnaissent et qu’ils saluent en prenant la pose à ses côtés.
C’est cette boxe-là qu’on aime. Et c’est celle que le champion olympique véhicule et promeut.
Loin de l’image business qu’on veut lui coller, il reste un précieux ambassadeur des valeurs de l’olympisme. Respect, rigueur et transmission.
Avant Rio puis après sa médaille olympique, la signature de son contrat avec Canal Plus et les sponsors levés, il n’a pas changé.
Victor et Tony Yoka aux côtés de Laëtitia Yvon
Il trouvera souvent le temps, donnera toujours un sourire, saluera à chaque fois les anciens.
C’est ce Tony-là qu’il faut apprendre à connaître et continuer à soutenir. Ce sont ces jeunes-là qui se sont construits seuls entourés des talents de nos éducateurs et sur la terre francilienne, dans nos quartiers qui portent le sport et lui permette de continuer à rassembler et à porter des valeurs sociétales puissantes. Ils portent le message qui devient alors audible pour une jeunesse francilienne parfois en perte de repère.
Le public français, les décideurs, les partenaires, les fans et les indécis doivent mesurer toute la responsabilité et prendre toute la mesure de ce qu’implique et impose de boxer au haut-niveau. Monter sur le ring pour prendre des coups avec la volonté de toucher sans se faire toucher.
L’art de la discipline, le game plan et le choix du staff pour que le jour du combat, on soit à la hauteur de l’enjeu. Et pour Tony Yoka, l’enjeu est beau et grand. À seulement 30 ans, le francilien aura accompli ce qu’aucun autre boxeur a réalisé : il a tout gagné chez les amateurs avec plus de 15 ans de pratique gravissant tous les échelons, travaillant sans relâche au nom des siens.
Celui qui est papa de deux petits garçons partage son temps entre sa famille si précieuse à ses yeux et ses entraînements qui rythment sa vie.
Oui, le samedi 14 mai, Bakole a été le plus fort et sa victoire est belle. Tony Yoka le reconnaîtra avec la lucidité et l’humilité d’un champion qui apprend et qui n’abandonne pas « Tout le monde a bien vu que ce soir, mon adversaire était plus fort et je salue sa victoire » dira-t-il à tous les supporters qu’il remercie d’être venu. On sent évidemment la déception mais on ne s’en réjouit pas.
Envoyé au tapis dès le premier round, il parviendra, avec le cœur et les tripes d’un jeune qui ne lâche pas au nom des siens à rester debout jusqu’au gong final.
Alors qu’on s’interroge sur la place de la Boxe aux Jeux Olympiques, rappelons que nos champions ont du talent, et en Boxe, dans la catégorie reine, il faut du temps pour apprendre et s’imposer dans le Top 10 particulièrement relevé. Ce temps d’apprentissage ne doit pas faire oublier, bien au contraire, les talents de nos ligues et comités régionaux à transmettre à travers les bénévoles, les éducateurs et les clubs franciliens des valeurs qui font de la boxe une école de la vie et de nos boxeurs de grands ambassadeurs du label francilien et de la richesse du territoire.
Cette conquête-là est précieuse, ambitieuse et audacieuse. Et elle ne fait que commencer.
Le champion olympique Tony Yoka aux côtés du médaillé olympique Souleymane Cissokho
Souad Soulimani